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Manuel Valls se donne deux ans pour réécrire le Code du travail / Novembre 2015

Myriam El Khomri a dévoilé ce mercredi les grandes lignes de sa réforme. Prudent à l’approche des régionales, l’exécutif promet de préserver les «droits fondamentaux» des salariés. Mais il prépare de nouveaux assouplissements des 35 heures. Le poids de l’accord d’entreprise sera renforcé mais les arbitrages clefs restent en débat.
Des pistes de travail attendues, beaucoup de questions renvoyées à plus tard, une nouvelle série de missions lancées pour compléter la collection déjà fournie de rapports, un délai de deux ans pour finaliser la réécriture du Code du travail, de trois ans pour regrouper les branches, et une certaine prudence d’ensemble : la présentation, ce mercredi à Matignon par la ministre du Travail, Myriam El Khomri, de ses pistes de réforme sur le Code du travail n’aura pas beaucoup fait avancer le dossier alors que le projet de loi est annoncé pour janvier. Elle aura toutefois été marquée par l’annonce denouvelles possibilités futures d’assouplissement des 35 heures , par accord d’entreprise. Cette opération de communication visait avant tout à rassurer la gauche à l’approche des élections régionales de décembre  et les syndicats, soucieux de préserver les droits des salariés.
Une « véritable révolution »
Manuel Valls et sa ministre ont ainsi répété que s’ils ambitionnent bien de « donner plus de place aux accords d’entreprise » et de « renforcer » le rôle des branches, il n’était pas question de sacrifier les « principes fondamentaux qui font notre droit du travail », comme « le SMIC et le contrat de travail »« Il n’y aura pas d’inversion de la hiérarchie des normes », ont-ils assuré. Au risque, pointé par le patronat , que le champ des possibles ouverts par la réforme s’avère au final limité. Cela interroge sur sa capacité future à soutenir l’emploi, angle sous lequel la droite concentre déjà ses critiques.
« Certains parlent de “réformette” au prétexte que l’on ne reviendrait pas sur les protections fondamentales. Mais enfin, réformer, ce n’est pas faire le choix de tout casser, de la régression ! » s’est défendu Manuel Valls, pour qui la réforme à venir est même une « véritable révolution ».
Une architecture en trois niveaux
Concrètement, le Code du travail sera « réécrit », en deux ans, de « manière claire, accessible » et selon une architecture en trois niveaux, a-t-il annoncé. Le premier niveau fixera l’« ordre public social », socle de droits intangibles auxquels il ne sera pas possible de déroger. Le deuxième indiquera les domaines ouverts à la négociation et fixera l’articulation entre la branche et l’entreprise. Le troisième regroupera les dispositions applicables en l’absence d’accord de branche ou d’entreprise.
Une mission est confiée à des sages du Conseil d’Etat et de la Cour de cassation pour définir, d’ici à janvier, les « principes fondamentaux du droit du travail », qui guideront la réécriture du Code. Cette future architecture est inspirée des préconisations effectuées au printemps par Robert Badinter, qui présidera la commission des sages.
La partie du Code du travail dédiée au temps de travail sera, elle, réécrite dès janvier pour mettre en œuvre les assouplissements des 35 heures promis (sans modification de la durée légale du travail) et des mesures inspirées du rapport Mettling sur l’impact du numérique sur le travail (droit à la déconnexion, sécurisation des forfaits jours).
D’autres arbitrages clefs attendront
Donner plus de place aux accords d’entreprise nécessite d’y renforcer la culture et la dynamique du dialogue, autre objectif affiché. L’exécutif n’a pas retenu l’idée du rapport Combrexelle d’imposer une durée limitée aux accords, mais prévoit de systématiser les clauses de revoyure. Il promet aussi de « simplifier » les règles de révision et de dénonciation des accords : une mission est confiée au juriste Jean-François Cesaro.
D’autres arbitrages clefs attendront aussi : le principe de l’accord majoritaire sera étendu, mais selon un rythme et des modalités qui restent à définir. L’exécutif exclut d’autoriser les référendums auprès des salariés faute d’accord mais n’a pas précisé le sort à réserver à un salarié qui refuserait un accord modifiant son contrat de travail. Pour que les TPE et PME dépourvues de syndicats ne soient pas les oubliées de la réforme, il préconise que les branches (leur nombre doit passer de 700 à 200 d’ici à trois ans) bâtissent des accords spécifiques clefs en main. Autre piste privilégiée : renforcer les possibilités de mandatement d’un salarié par un syndicat pour négocier.